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Figurez-vous que je viens de redécouvrir le pain azyme. Je dis bien  » redécouvrir « , car ce pain est très ancien. Il remonterait au Néolithique.

Si vous avez oublié vos leçons d’histoire, le Néolithique, c’est le moment où les chasseurs-cueilleurs, chers aux activistes des régimes paléos, deviennent des agriculteurs. C’est la période qui précède l’âge de bronze.

Cela ne vous dit rien non plus ? C’est pourtant plus proche de nous. Bref, le pain azyme, ça existe depuis au moins 5 000 ans, voire 11 000 ans.

C’est bien un vieux pain. Si j’insiste autant sur cette ancienneté, c’est que le pain azyme ne représente pourtant, actuellement, que 2,6 % de la panification croustillante dans un pays comme la France (1).

Ce n’est pas beaucoup. C’est bien loin derrière les biscottes et les autres formes de pain. Voyons ce que ce vieux pain peut faire pour nous et comment nous débarrasser, au passage, de quelques idées reçues

Nous débarrasser de quelques idées reçues

 » Le pain azyme est un pain religieux « 

C’est vrai, le pain azyme est utilisé dans plusieurs rites religieux.

Il correspond à la matza, qui est consommée au moment de Pessa’h (2), une des trois fêtes solennelles du judaïsme.

Cette fête rappelle le moment où poursuivis par l’armée du Pharaon d’Egypte, ne pouvant attendre que le pain soit levé, les peuples de l’Exode, conduits par Moïse, se sont alimentés avec la matza, juste avant de franchir la Mer Rouge.

Sous le nom d’Hostie, qui veut dire victime, le pain azyme est au coeur de la célébration de l’Eucharistie, dans le rite catholique.

Mais, de nombreux rites chrétiens, non-catholiques, notamment orthodoxes, rejettent le pain azyme au moment de l’Eucharistie et lui préfère le pain levé, autrement dit, le pain ordinaire.

De toute façon, les pains utilisés dans le cadre de rituels religieux font l’objet d’une préparation particulière, qui n’a rien à voir avec le pain azyme ou levé qui peut être consommé tous les jours.

Dans son cadre ordinaire, le pain azyme veut simplement dire qu’il est sans levain ou levure. Le mot vient du grec. Le « a » est ce qu’on appelle le « a » privatif et la syllabe « zyme » vient de « zumos » qui signifie levain. « a » « zumos » veut dire « sans » « levain ».

 » Le pain azyme n’a pas de goût et il est cher « 

Si vous voulez dire qu’il n’est pas salé, vous avez raison. Suivant les marques, la composition en sel varie de 0,0017 gr pour 100 gr à 1 gr. Ce n’est pas tout. Sa teneur en matières grasses varie de 0,1 gr pour 100 gr à 1,5 gr.

Vous voyez, tout cela est très faible. C’est la raison pour laquelle il convient bien aux régimes sans sel et basses calories.

Cependant, c’est une erreur de croire qu’il n’existe que sous sa forme banale. Il existe beaucoup de pains azymes et de toutes formes.

Certains fabricants, ils sont une quinzaine dans le monde, dont 4 en France, proposent jusqu’à 200 références, avec près d’une cinquantaine de recettes et des épaisseurs ou des conditionnements de toutes sortes.

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Vous-même, vous pouvez l’agrémenter de multiples façons. Au moment de l’apéritif, par exemple, vous pouvez le servir en petits carrés aromatisés, sucrés ou salés et en faire de délicieux toasts avec vos condiments préférés.

Quant aux prix, selon les marques et la composition, plus ou moins travaillée, en général, ils varient, pour 100 gr, de 0,47 à 1,55 €. Rien d’exceptionnel, donc.

 » Le pain azyme est introuvable et ne se conserve pas « 

Èvidemment, vous n’allez pas trouver du pain azyme dans la première boulangerie venue. Cela dit, tous les fabricants ont des sites très bien faits et les rayons de la grande distribution proposent toujours au moins une marque.

Quant aux marques plus « travaillées », certaines sont même distribuées en pharmacie ou parapharmacie.

Pour ce qui est de sa conservation, détrompez-vous. Il se conserve très facilement, c’est même sa particularité. Si vous le stockez, avec son conditionnement d’origine, dans un endroit sec et tempéré, il ne va pas bouger pendant au moins un mois.

Pas si mal. Si vous ouvrez ce conditionnement, il vous suffit de mettre les galettes dans une boîte en fer, par exemple, et de placer cette boîte dans un endroit également sec et tempéré. L’effet est le même. Essayez de faire la même chose avec du pain ordinaire ou des biscottes !

Un pain naturel et prophylactique

Un pain naturel

Le pain azyme, c’est de la farine mélangée avec de l’eau pendant une vingtaine de minutes et passée au four également pendant une vingtaine de minutes. Il n’y a donc pas d’autres ingrédients que la farine et un peu de sel.

Par comparaison, le pain traditionnel, le plus réglementé, notamment par le décret « pain » de 1993, en comprend beaucoup plus.

Leur liste n’est nulle part visible, mais s’y ajoutent la levure, bien sûr, mais aussi 5 adjuvants naturels, farine de fèves, farine de soja, malt de blé, gluten et levure désactivée, plus un auxiliaire technologique, l’amylase fongique (3).

Ce mélange est fait la plupart du temps chez le meunier et arrive tout prêt chez le boulanger.

La situation se corse avec les pains dits « améliorés » ou  » spéciaux « . Pour faire ces pains, aux 5 adjuvants précités, vont être ajoutés des additifs du type E 300 ou E 254. Ils prennent 8 pages dans la liste qui accompagne leur réglementation.

Un certain nombre d’auxiliaires technologiques supplémentaires complètent cette liste. Et comme si cela ne suffisait pas, les viennoiseries, de leur côté, concentrent à elles seules plus d’une centaine d’additifs autorisés !

Tout dépend donc de la farine et de sa qualité. Il y a, en gros, 5 grands types de farine, classés selon leur taux de cendres : farine de blé tendre, farine d’épeautre ou de grand épeautre, farine de riz, farine de sarrasin et farine de seigle.

Le taux de cendres (4) mesure la part de résidus minéraux après avoir incinéré de la farine pendant 1 h à 900°. Une farine T 55 qui est celle du pain de tradition signifie que sa teneur en minéraux est de 0,55 %.

Plus la farine est purifiée et débarrassée du son, dans lequel se concentrent les pesticides, plus ce taux est faible. À l’inverse, un pain complet intégral, par exemple, est fait avec une farine T 150.

Si vous voulez mon avis et pour faire court : en boulangerie traditionnelle, le  » must du must », c’est un pain fait avec une farine bio, tamisée sur meule de pierre et sans additifs.

Avec le pain azyme, le » must du must « , c’est un pain fait avec un mélange bio de farine d’épeautre et de sarrasin. Ce mélange a aussi l’avantage d’être quasiment sans gluten.

Èvidemment, même s’il n’est pas certifié bio, ce mélange est toujours sans améliorants et sans levure industrielle.

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Un pain prophylactique

Allez, je vous l’accorde. Prophylactique, ça fait un peu pédant. Qu’est-ce que c’est qu’un processus prophylactique ? C’est un processus actif ou passif ayant pour but de prévenir l’apparition, la propagation ou l’aggravation d’une maladie.

Il y a d’autres définitions, mais c’est la meilleure que j’ai trouvée. Bon très bien, mais encore ?

Faisons un petit saut dans le passé et écoutons Hildegarde de Bingen (5), l’étonnante Bénédictine de la fin du XI ème siècle.

Cette femme remarquable, proclamée Docteur de l’Èglise en 2012 par le pape Benoît XVI, rejoignant ainsi trois autres femmes remarquables, Catherine de Sienne, Thérèse d’Avila et Thérèse de Lisieux, ce sont d’ailleurs les seules femmes à avoir été ainsi proclamées, est aussi connue comme étant une des toutes premières naturalistes.

Je vous ennuie ? Normal, tout cela est bien loin désormais. Quoi qu’il en soit, à une époque où le pain était un élément fondamental de l’alimentation, elle disait :  » l’épeautre donne de l’entrain à ceux qui en mangent un peu chaque jour et met de la joie au coeur. »

L’épeautre date des premiers temps de l’agriculture et s’il ressemble au blé, il ne peut néanmoins pas lui être assimilé.

Or, voyez-vous, l’épeautre est composé de tous les éléments figurant sur la liste des minéraux : sodium, calcium, potassium, magnésium, silicium, soufre, phosphore, et fer. Ce n’est pas tout.

Il est plein de vitamines B 1 et B 2. Et surtout, il apporte à l’organisme les 8 acides aminés essentiels qu’il est incapable de synthétiser par lui-même.

Je vous les rappelle pour mémoire parce que je vous en ai déjà parlé, notamment, à propos du quinoa et de ses bienfaits. Il s’agit de la valine, de l’isoleucine, de la thréonine, du tryptophane, de la phénylalanine, de la lysine, de la méthionine et de la leucine.

L’intérêt de toutes ces propriétés, c’est qu’elles jouent un rôle très actif contre beaucoup de pathologies. C’est ça la prophylaxie ! Elles sont bien utiles pour aider à contrecarrer les désordres gastro-intestinaux et les troubles du métabolisme.

Et le pain azyme dans tout cela ? Et bien, c’est celui qui vous permet de profiter au mieux des bienfaits présents dans les céréales.

C’est celui dont les ingrédients sont les mieux connus. Je vous disais un peu plus haut que le must du must, c’est un pain azyme à la farine d’épeautre et de sarrasin, et bien, en fait, rien de plus simple pour s’en procurer et en connaître les proportions.

Avec du pain ordinaire, ça va être un peu plus difficile.

Faire son pain azyme maison

Après tout pourquoi ne feriez-vous pas vous-même votre pain azyme ? Il n’y a rien de plus simple et cela ne prend pas beaucoup de temps.

Prenez 200 gr de farine, certifiée bio, si possible. Mélangez-là avec une demi-cuillère à café de sel, et 12 cl d’eau chaude. Malaxez-le tout pendant une vingtaine de minutes environ, mais pas plus.

Et si ça colle, rajoutez un peu de farine, c’est que vous avez mis trop d’eau. N’oubliez pas de préchauffer votre four à 200° pendant tout ce temps.

Divisez votre mélange en deux boules que vous allez étaler avec un rouleau à pâtisserie ou une bouteille pour faire deux galettes. Piquez, à intervalles réguliers, chacune des deux galettes avec une fourchette.

Placez vos deux galettes, que vous avez préalablement arrondies avec un cercle à pâtisserie, pour faire plus beau, sur la feuille de papier sulfuré, saupoudrée de farine, que vous avez mise sur votre plaque de four.

Enfournez, mettez votre thermostat à 200°, attendez entre 15 et 20 minutes, et sortez votre plaque dès l’apparition de jolies tâches dorées, puis laissez refroidir une dizaine de minutes.

Voilà, vous avez votre pain azyme  » maison « , fait avec la farine de votre choix.

Pour la petite histoire …

Sachez que le pain azyme peut avoir d’autres utilisations que celles que je viens d’évoquer. Pendant la période de Noël, en Provence, c’est avec lui que sont faits les savoureux nougats aux noisettes (6). Enfin … Les très fines feuilles qui les recouvrent.

Sources

(1)Syndicat de la panification croustillante et moelleuse

(2)Le Monde, Histoire des religions

(3)Nouvelles de la boulangerie patisserie

(4)Classification des farines

(5)S’alimenter selon Hildegarde de Bingen

(6)Recette chef Simon – Le Monde

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